Imany en concert le samedi 2 juin 2018 à 22h30 sur la grande scène
« J’ai toujours aimé chanter, j’ai longtemps pensé que ce n’était pas pour moi ! » Si Imany a trouvé sa voie sur le tard, elle a depuis parcouru un bon bout de chemin, sans pour autant presser le pas, en prenant le soin de choisir le bon tempo.
De premières parties en concerts sous son nom, elle aura su peaufiner son style, avant de coucher un premier EP, puis un disque dans la foulée. Ce sera en 2011 « The Shape Of A Broken Heart », le début d’une irrésistible ascension vers les sommets, portée par le titre « You Will Never Know ». Plus de 400 concerts à travers le monde, près de 400.000 disques écoulés, dont presque une moitié en France, Imany a depuis effectivement tracé sa route, creusé son sillon entre soul, folk, blues et pop. Sans forcer elle a su imposer son style, une mélancolie rageuse, des textes aiguisés sur l’expérience d’une vie. Celle d’une jeune fille pour qui tout n’était pas joué d’avance. Voilà peut-être pourquoi elle s’est choisie comme surnom un mot que l’on peut traduire par « La foi » en swahili.
Cinq ans après ses débuts, Imany est donc de retour. On l’avait quittée jeune femme, la voilà mère. Une maternité qui rime avec la maturité d’un second recueil qui fait mieux que confirmer l’essai. Elle revient transformée, sans pour autant avoir changé de cap esthétique : toujours aux frontières des nombreux styles qui ont façonné son succès, sa voix singulière traduit en chansons ciselées un esprit sans œillères. De même elle reconduit l’équipe qui l’avait menée au sommet.
Pour composer cet album, la chanteuse aura multiplié les allers et retours entre Paris et Dakar, des sessions régulières au studio Globo et au studio parisien Question de son. À commencer par « Don’t be so shy », dans une version acoustique inédite, dont le remix par Filatov et Karas (également présent au générique) est l’un des récents phénomènes mondiaux: plus de 160 millions de vues sur Youtube ! Pour autant, la popularité de ce titre ne doit pas éclipser les qualités intrinsèques de ce nouvel album, plus produit, avec de plus larges ambitions orchestrales tout en s’appuyant sur le quartet rythmique qui donne son assise à ce groupe.
« Le live a donné des impulsions nouvelles », un son de groupe plus organique, qui a la double faculté de toucher à la fois à l’intime et à l’universel. »
Il en va de même pour les textes, qui interpellent tout à la fois la nature de l’Homme et interrogent la femme qu’elle est. Des chansons qui assènent quelques vérités sur l’amour, et toutes ces histoires qui sont liées : « No reason no rhyme », sur une rupture assumée, tout comme «Nothing to save» ou dans un registre plus véhément « The wrong kind of war », « You don’t belong to me », un amour soi-disant impossible façon Roméo et Juliette, ou encore « I used to cry », un titre qui tire un trait sur le passé en prenant l’inspiration du côté des grandes voix du blues et du jazz : Billie Holiday, Dinah Washington… Plus optimiste, la superbe love song « I long for you » prend quant à elle des accents Dylaniens, influence majuscule que l’on retrouve sur « I’m not sick but I’m not well », où elle dépeint : « l’état dans lequel on se trouve lorsqu’on tombe amoureux. Tu n’es plus rien, tout devient
concentré autour d’une personne. T’es pas malade, t’es juste pas bien… ou juste très bien ! » Un état qui fait perdre la raison sur lequel Imany revient avec la déclaration d’amour « Lately ».
C’est d’ailleurs en regardant l’actualité qu’Imany (prop)ose, entre les lignes ou de façon explicite, montrer une autre facette de sa personnalité : concernée par l’état du monde. « Save our soul » est ainsi un cri d’amour contre la violence télévisuelle, téléguidée. Même constat, quelque peu amer, avec « The Rising Tide », qui aborde le déni collectif face aux problèmes environnementaux.
À ces deux textes, un brin désenchantés, on peut lire une réponse à distance avec la conversation imaginée entre Nelson Mandela et la génération actuelle : « There Were Tears » constitue un juste hommage à l’un des derniers héros du vingtième siècle.
Pas question de sombrer, pour celle qui a pris tant de chemins détournés avant d’y arriver. “C’est dans l’obscurité qu’il est beau de croire en la lumière”, confie-telle dans «The Silver Lining», la chanson la plus positive. Message reçu, bien entendu.
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